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Cette exposition offre un récit exceptionnel sur plus d’un siècle d’histoire coloniale et d’immigration des Suds et s’attache au regard posé sur ces milliers de migrants, aujourd’hui composante forte de la société locale et régionale. À travers des images exceptionnelles, une histoire oubliée se révèle ici, une histoire longue, complexe et étonnante, toujours en mouvement et féconde d’une histoire commune, constitutive des mémoires et des identités locales. La région Centre est un territoire atypique et original : ni zone frontalière, ni polarisée par une importante métropole régionale fixant les populations migrantes et se situant néanmoins à proximité de l’Ile-de-France et de ses flux migratoires conséquents tout au long du siècle. Elle n’apparaît pas d’emblée comme une destination d’accueil pour les migrations en provenance des Suds et leur présence est plus diffuse sur ce territoire, moins marquée par les espaces urbains et par les deux conflits mondiaux. Et pourtant, cette région possède un important héritage migratoire. Depuis plus d’un siècle, des populations venues des quatre coins du monde ont foulé le sol de cette terre. Au début du XX<sup>e</sup> siècle, la région compte peu d’étrangers : trois mille neuf cent quarante-neuf en 1911, représentant 0,21 % de la population régionale totale. Cette population étrangère est surtout constituée d’immigrés en provenance d’Europe, Italiens et Espagnols principalement. À l’heure de la mobilisation durant les deux conflits mondiaux, l’immigration en provenance des colonies prend tout son poids et rend visible cette présence. Mais c’est pendant l’entre-deux-guerres que les vagues migratoires se diversifient, tant au niveau des pays d’origine de ces nouveaux arrivants, que des motivations de leur départ. Russes, Arméniens, Polonais, Chinois, Italiens, Maghrébins et Turcs sont autant de migrants qui trouvent un lieu d’accueil en région Centre. La période d’après-guerre va de pair avec la période de plein emploi en raison d’un besoin de main-d’œuvre croissant pour reconstruire le pays. Les migrations, jusqu’alors en provenance d’Europe, cèdent peu à peu à une nouvelle immigration d’Afrique du Nord, majoritairement des Marocains, arrivant en nombre à partir de 1975. Les dernières décennies sont marquées par les crises des espaces urbains, le chômage, les difficultés d’intégration et par des poussées de fièvre frontiste comme celle de Dreux en 1983. Mais elles coïncident aussi avec un dynamisme naissant en région, comme dans le Limousin, à travers divers festivals locaux et un tissu associatif de plus en plus actif.