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Découvrez cette semaine l’article de Pascal Blanchard, historien, membre du laboratoire Communication et Politique (CNRS), codirecteur du Groupe de recherche Achac, et Christine de Gemeaux, professeure émérite de civilisation et d’histoire des idées allemandes à l’Université François-Rabelais de Tours, directrice de la revue Cahiers d’histoire culturelle de l’équipe « Histoire des représentations/Interactions culturelles et discursives ». Intitulé Disposer des corps : contrôler, surveiller et punir, cet article dresse un panorama des dispositifs politiques et juridiques d’accaparement et d’asservissement des corps racisés pendant la période coloniale du XIXe siècle. Les auteurs rappellent, par ailleurs, que le sexe est intimement lié aux processus de domination coloniale car il s’agit à la fois de castrer, en pratique ou symboliquement, les hommes racisés – perçus comme de potentiels rivaux sexuels – et de posséder sexuellement les femmes racisées pour mieux affirmer leur subalternité.
Article « Disposer des corps : contrôler, surveiller et punir » issu de la partie 3 Science, race et ségrégation de l’ouvrage Sexualités, identités & corps colonisés (p.267-279)*
© CNRS Éditions / Éditions la Découverte / Groupe de recherche Achac / Pascal Blanchard & Chrisitine de Gemeaux (Sexualités, identités & corps colonisés, 2019)
Disposer des corps : contrôler, surveiller et punir[1]
Par Pascal Blanchard & Christine de Gemeaux
Le XIXe siècle s’ouvre sur une nouvelle ère coloniale. Dans le prolongement de l’indépendance d’Haïti en 1804 et de la défaite de Napoléon Ier en 1815, la période 1820‑1830 constitue un basculement qui annonce la fin progressive de l’économie de traite et des Empires esclavagistes. Après avoir connu une période de reflux – depuis le traité de Paris (1763) –, la France commence son redéploiement en s’engageant dans l’expédition d’Alger en 1830. Dès la seconde moitié du XIXe siècle, le continent africain passe, peu à peu, sous la coupe des grandes puissances européennes qui entérineront leurs nouvelles prises de possession, lors de la conférence de Berlin, de 1884 à 1885, concrétisée par un traité qui vient conclure cinq décennies d’explorations et de conquêtes territoriales.
La Grande-Bretagne, quant à elle, étend son contrôle en Afrique mais aussi en Asie où elle occupe de nouveaux territoires autour de l’Empire des Indes – comme Singapour en 1819 ou la Birmanie en 1826 – au détriment des Empires perse, chinois et ottoman qui entament leur long déclin. L’Allemagne, pour sa part, a conquis sa « place au soleil » dès juillet 1884, s’installant en Afrique (actuels Namibie, Togo, Cameroun, puis Tanzanie, Rwanda et Burundi) et dans le Pacifique (îles Samoa, Nouvelle-Guinée allemande, îles Caroline, Marianne et Palau en 1899). En Amérique du Sud, la marche vers les émancipations a commencé et permet à Simón Bolivar de contribuer à l’indépendance des anciennes colonies espagnoles, dès 1813. Au Brésil, celle-ci est proclamée en 1822, devenant officielle en 1825 après trois ans de luttes. Ce grand siècle de conquête de nouveaux Empires coloniaux – qui court jusqu’aux lendemains de la Première Guerre mondiale – va aussi être celui de la mise en ordre systématique des corps.
Dans ce long processus de coercition commencé dans les décennies précédentes, le XIXe siècle fait rupture, puisqu’il marque un tournant décisif dans les bio-politiques[2] de contrôle des corps et des processus de reproduction des populations « indigènes » serviles et/ou colonisées aux Amériques, en Afrique, en Océanie et en Asie[3]. Face aux remises en question progressives des systèmes esclavagistes, la question se pose, en effet, de savoir comment maintenir une quantité suffisante de main-d’œuvre servile pour soutenir la productivité des économies capitalistes naissantes – et ce, alors même que les insurrections et les révoltes se multiplient dans la Caraïbe, dans les Indes, en Algérie ou dans le sud de l’Afrique – tout en développant de nouvelles politiques de gestion et de domestication des corps colonisés qu’il faut aussi, selon l’expression généralement usitée à l’époque, « mettre au travail ».
Pensés comme des espaces martiaux et carcéraux, les Empires coloniaux qui émergent au début du XIXe siècle vont ainsi se voir appliquer des techniques de pouvoir visant à produire ségrégation et hiérarchisation sociales, en fonction de critères spécifiques de genre, de classe et de « race ». Passant du statut de simple objet au temps de l’esclavage, le corps du/de la colonisé·e va s’inscrire dans une nouvelle posture, celle du/de la dominé·e qu’il faut désormais surveiller, contrôler et punir dans son corps, voire violenter[4] si il/elle n’accepte pas le nouvel ordre colonial qui se met en place.
Discipliner et contrôler les « corps-machines »
Ce nouvel ordre vise d’abord à légitimer le « grand partage » entre dominants et dominés, colons et colonisés, qui s’effectue dès les débuts des conquêtes coloniales. Car, ainsi que le résume Auguste Billiard, administrateur colonial en Algérie, en 1899 : « La minorité blanche doit établir un régime politique d’exception où l’ordre et la sécurité primer[ont] sur les droits de l’individu[5]. » Promulgué en 1881 en Algérie – mais étendu ensuite, à partir de 1887, à l’ensemble des territoires de l’Empire colonial français – le Code de l’indigénat a ainsi pour vocation de constituer les populations autochtones en un « corps d’exception » soumis à une législation terriblement discriminante et raciste qui fait rapidement système.
L’identité de l’« Autre » se résume alors à la couleur de sa peau, à ses déviances et à ses pratiques sexuelles. Contrôler celles-ci, c’est contrôler la « race » et donc maintenir l’ordre colonial[6]. Ces corps impériaux[7] sont au cœur de la construction des nouveaux modèles coloniaux qui s’élaborent au XIXe siècle. Le corps du colonisé est progressivement démonisé[8] ; c’est soit un « sauvage » pour l’Afrique, soit un « métis sans conscience » pour l’Amérique du Sud, soit un « fourbe fanatique » pour l’Orient, soit un « danger » pour l’Extrême-Orient et l’Amérique du Nord.
Mises en place un peu partout dans les espaces colonisés, ces législations, qui sont pour partie un héritage des différents Codes noirs promulgués à partir du XVIIe siècle, mettent en effet au pas, comme en Algérie, aux États-Unis, au Brésil, dans l’Empire colonial allemand ou dans l’Empire des Indes, les droits des colonisé·e·s (ou des Amérindien·ne·s) en exerçant d’abord une contrainte forte sur la mobilité des corps : les « indigènes » y sont désormais pourvus d’un « permis de circuler » et doivent demander l’autorisation de l’administration coloniale pour les actes les plus simples de la vie : se marier, circoncire les fils, hériter, se déplacer, organiser des funérailles…
Dans un siècle qui a érigé la productivité et la rentabilité économiques en icônes de la « modernité », être « naturellement » improductif renvoie ces corps à leur statut commun de « races inférieures ». Dans les colonies de peuplement, surtout, cette question apparaît vitale. Du côté des Européens, la proportion de populations féminine et masculine devient rapidement un enjeu majeur ; comme le disent de très nombreux partisans de l’expansion coloniale en Europe, « point de colonisation sans femmes ». Ainsi, le premier congrès colonial, tenu en septembre 1886 à Berlin, souligne d’ailleurs, avec force, la nécessité d’associer la femme allemande au processus de colonisation. On y met l’accent sur le rôle de la « femme germanique » comme représentante de la culture (Kulturträgerin), gardienne des valeurs et de la famille, éducatrice des enfants de colons[9].
Dans ce contexte, les politiques de gestion des flux humains mises en place vont évidemment porter sur l’expatriation de femmes blanches (orphelines, veuves avec ou sans enfants, femmes de « mœurs légères » ou prostituées…) dont l’utilité sociale est contestée dans les métropoles, mais qui se voient offrir une « seconde chance » dans les Nouveaux Mondes qui s’ouvrent alors. Dans le même temps, s’affirme un interdit absolu, celui d’une sexualité entre les « indigènes » et les femmes blanches, et les images de punition se multiplient comme une sorte d’esthétisme sado-masochiste. Comme le précise Ann Laura Stoler, « en tant que gardienne d’une communauté culturelle et morale spécifique, les femmes blanches devaient protéger leur honneur[10] ».
En Algérie, seule véritable colonie de peuplement du second Empire colonial français (avec la Nouvelle-Calédonie), on multiplie les projets entre 1840 et 1900 : des « mariages au tambour » de Thomas Bugeaud (1842) à la Société française d’Émigration des femmes aux colonies (1897‑1898)… Dans le Sud-Ouest africain, on envoie de jeunes Allemandes pour se marier ou servir de domestiques. La Deutsche-Kolonialgesellschaft mène, dès 1898, une campagne, reprise en 1907 par le Deutsch Kolonialer Frauenbund, puis en 1911 par le Frauenbund der Deutschen Kolonialgesellschaft à Berlin, pour palier, sans succès, le manque de femmes. Dans un roman magistral, Au-delà du silence, André Brink[11] narre de façon documentée le destin d’orphelines et de femmes nécessiteuses du port de Brême débarquées dans le Sud-Ouest africain ; certaines épouseront des fonctionnaires ou des soldats coloniaux et d’autres, jugées plus disgracieuses, finiront dans les bordels militaires, comme celui de Frauenstein, dans un contexte de violence exacerbée ; mais il existe aussi des départs volontaires. En Australie et en Nouvelle-Zélande, la Grande-Bretagne, sous l’impulsion de la United British Women’s Emigration Association fondée dans les années 1880, déverse, elle aussi, son trop-plein de classes laborieuses féminines. Dans les Indes néerlandaises, la présence blanche (assez tardive) assure la pérennisation de l’édifice colonial au début du XXe siècle.
Enfin, les deux grands modèles d’importation de migrants que sont le Canada et les États-Unis vont faire de la gente féminine un objectif démographique majeur pour compenser la surpopulation masculine qui débarque en flux réguliers dans le Nouveau Monde. Partout, la volonté d’équilibre des sexes de « souches européennes » double les politiques de contrôle des unions métissées et les différentes stratifications de tolérance envers les couples non-officiels que ce soit à travers la prostitution, les emplois de maison « officieux » ou l’acception du viol institutionnalisé. Ce viol colonial et le mépris du corps-indigène ou du corps-esclave marquent d’ailleurs encore le présent de toutes les sociétés postcoloniales[12].
Cependant, les sociétés coloniales – et leur minorité blanche – ne peuvent se contenter de cette seule gestion démographique de l’entre soi. Car, en vertu de la hiérarchisation raciale du travail alors en place dans les colonies, il apparaît très vite nécessaire de s’occuper de la valorisation de la reproduction des corps serviles et/ou colonisés in situ. Ainsi naissent, aux États-Unis, à Saint-Domingue ou dans certaines îles anglaises et françaises de la Caraïbe, des politiques natalistes visant à exploiter au maximum la main-d’œuvre déjà présente tout en limitant les coûts de son renouvellement.
Dans les sociétés post-esclavagistes, la favorisation des mariages entre (ex)-esclaves et la pression exercée sur les femmes pour qu’elles aient le plus grand nombre d’enfants – via l’interdiction des pratiques abortives, la plus grande sévérité vis-à-vis des infanticides ou la récompense faite aux mères de familles nombreuses – sont au centre des préoccupations. Dans des colonies comme en Australie ou au Canada, par exemple, des dispositifs de gestion aussi divers qu’empiriques de la fertilité et de la natalité des populations assujetties peuvent conduire les autorités coloniales (étatiques ou missionnaires) à retirer aux mères « indigènes » leurs enfants, alors confiés à des institutions spécialisées, qu’elles soient publiques ou privées.
Produire et reproduire, telles sont donc les « missions » que les maîtres et les colonisateurs attribuent aux corps serviles et/ou colonisés dans la première moitié du XIXe siècle. Pour ce faire, les espaces post-esclavagistes et coloniaux, segrégués et carcéralisés, sont aussi pensés comme des lieux où, dans le rapport dominant-dominé, la force doit évidemment primer sur le droit. Ainsi, les violences corporelles – propres aux systèmes esclavagistes et aux premiers Empires – qui touchent pêle-mêle femmes[13] et hommes[14], ne cessent pas avec les colonisations modernes et sont, tout au contraire, légalisées par les différents dispositifs tels le « régime d’indigénat » qui s’emploie désormais dans les Empires coloniaux britannique, français, portugais, allemand et néerlandais. Ces dispositifs, qui disent le « permis » et « l’interdit » aux seules personnes définies comme « indigènes », dans des sociétés de cantonnements et de frontières raciales strictes, légitiment un système de peines qui échappe volontairement aux principes généraux du droit tels qu’ils sont observés en métropole. Supposés adaptés aux infractions commises par les corps serviles et/ou colonisés, ils viennent sanctionner ceux qui dérogent au sacro-saint ordre racial et sexuel[15].
Sanctionner les corps, brutaliser les sociétés
Ces législations racistes et leur régime de peines attenant structurent, en effet, dans les pratiques comme dans les mentalités, un « droit de punir » qui est aussi un « droit de vie et de mort », puissamment patriarcal et racial, et conduit à brutaliser les corps collectifs en sanctionnant les corps individuels.
Ainsi, dans ses colonies, comme plus tard à l’époque nazie, l’Allemagne met-elle en œuvre la Sippenhaft (responsabilité clanique/familiale) qui permet de punir collectivement des villages entiers. Toute solidarité en faveur du/des coupable(s) doit être brisée[16] ; de même, dans la guerre de conquête en Algérie, la France applique la « responsabilité collective » à toute tribu dont un seul membre est considéré, par elle, comme rebelle à sa loi. Dans les périodes de conflits, d’ailleurs, à une époque où le « droit de la guerre » n’en est encore qu’à ses balbutiements en Europe, les « atteintes » faites aux corps sont non seulement banales mais banalisées : mutilations diverses, enfumades, exécutions sommaires, massacres, viols…
En temps de paix et de « mise en valeur » des territoires, ces législations n’en sont pas moins strictement appliquées, car l’ordre colonial repose sur elles. Cantonnés dans des « réserves » – comme les peuples amérindiens aux États-Unis ou au Canada, les Kanaks en Nouvelle-Calédonie, les Aborigènes en Australie, les Hereros et les Namas dans le Sud-Ouest africain allemand, dont on envoie les crânes à Berlin pour des mesures anthropométriques[17] et les Maoris en Nouvelle-Zélande… –, déportés dans des bagnes coloniaux[18], – comme les Kabyles de la révolte de 1871 expatriés à Nouméa[19] –, ou bien parqués dans des ghettos, des « villages nègres » ou dans des quartiers « indigènes », à la périphérie des villes blanches, les corps serviles et/ou colonisés ne peuvent en sortir que sous certaines conditions[20].
À tous ceux qui auraient des velléités de passer outre les color lines, le fouet est là pour rappeler la place de chacun. Pour les colonies allemandes, on rappellera le rituel punitif des vingt-quatre coups de chicotte, plus – dérision douloureuse – « un [dernier coup] pour le Kaiser ». Dans l’ensemble des mondes coloniaux sous domination blanche, le fouet – comme instrument « phallique » de brutalisation et de domination – apparaît comme symbolique de ce régime de force, martial et viril, qui s’impose à tous les corps serviles et/ou colonisés. Dans les sociétés post-esclavagistes, il scande toujours le rythme du travail et reste l’outil privilégié pour « tailler les Nègres » selon l’expression couramment usitée à l’époque[21]. Aux États-Unis – avant l’abolition de l’esclavage –, les divers châtiments et sévices subis par les esclaves (port obligatoire de carcans et d’entraves, marquage au fer rouge pour les fugitifs, viol, castration et mutilation…) sont en effet si inhumains qu’ils entraînent révoltes et insurrections ; à l’image de celle menée, en août 1831, en Virginie par Nat Turner.
Comme aux États-Unis, l’Amérique du Sud, la Caraïbe (révolution des esclaves à Saint-Domingue, de 1791 à 1804, qui conduit à la naissance de la première République noire d’Haïti) ou encore l’Afrique (Cetshwayo kaMpande contre les Britanniques en pays zoulou, en 1876, ou bien Samory Touré contre les Français, en Afrique de l’Ouest, entre 1887 et 1898) et l’Océanie (révolte des Kanaks contre le cantonnement colonial, sous la direction du chef Ataï, en 1878) connaissent des mouvements contestataires liés soit à ces traitements des (ex)-esclaves dans les sociétés post-esclavagistes ou au refus de la violence extrême des conquêtes coloniales. L’Empire colonial allemand n’est pas en reste avec la révolte des populations de Tové au Togo contre le chef de la station de Missahöhe (1895)[22], la révolte des Wahehe en Afrique orientale[23], la féroce guerre Maji-Maji[24] (1905‑1907), ainsi que les révoltes déjà mentionnées des Hereros et des Namas (1904‑1907). Ces révoltes déclenchent, à leur tour, de nouvelles punitions, de plus en plus extrêmes, comme un cercle infernal justifiant a priori et a posteriori des processus de contrôle et de domestication fondés sur une violence totale car touchant simultanément les corps individuels et collectifs. Ainsi, la majorité des populations hereros est-elle anéantie suite à un « ordre d’extermination ».
Tant physique que psychologique, cette violence, quelle que soit la forme qu’elle emprunte, a bien sûr aussi une forte dimension sexuelle[25]. Ainsi les châtiments corporels correspondent-ils à une économie des peines en même temps genrée et sexualisée – aux hommes les émasculations ; aux femmes les viols – dont l’objectif est bien d’humilier et de réduire les corps serviles et/ou colonisés tout en produisant, notamment par des spectacles publics parfaitement orchestrés, « effroi » et soumission chez les uns, « excitation » et puissance chez les autres. Aux États-Unis, la pratique des viols de femmes et des castrations d’hommes noirs devient systémique avec la naissance du Ku Klux Klan, organisation suprématiste blanche fondée le 24 décembre 1865 qui organise de manière ritualisée des lynchages, individuels et/ou collectifs, de Noirs.
Le lynchage aux États-Unis – comme en Afrique du Sud à la même époque – a pour vocation de réassigner le corps servile et/ou colonisé à sa « juste » place après une « transgression » (notamment sexuelle) de l’ordre racial/colonial. C’est d’ailleurs le propos du film Naissance d’une nation, réalisé par David W. Griffith. Immense succès populaire à sa sortie en 1915, le long-métrage a marqué la conscience américaine, alors qu’il opte, clairement, pour une défense du système esclavagiste, en manifestant un racisme débridé. L’une des scènes du film, décrit Gus, un ancien esclave noir – tous les acteurs noirs sont en réalité des Blancs grimés – tentant de séduire une jeune Blanche, Flora Cameron, laquelle, effrayée, fuit dans la forêt. Acculée à un précipice, elle s’y jette et meurt pour fuir le viol inévitable. Le Ku Klux Klan tue Gus en représailles. Les Noirs y sont uniquement présentés comme une menace politique et sexuelle.
Ce qui fait toute la spécificité du lynchage, c’est qu’il est un véritable « spectacle ». Il procède simultanément d’une vieille économie des peines, issue de la période esclavagiste, celle aussi des supplices publics d’Ancien Régime exportée, par les Britanniques, dans leurs treize colonies d’Amérique. Elle vient s’associer aussi à un « goût » prononcé pour les exhibitions humaines et leur commercialisation qui mobilise les foules en nombre[26]. On ne s’étonne pas, dès lors, que des photographies de lynchages – comme celles du supplice que Jesse Washington, âgé de 17 ans au moment de sa mort le 15 mai 1916 à Robinson (Texas), eut à subir pendant de longues heures – soient couramment éditées et diffusées aux États-Unis. Commercialisés sous forme de photographies ou de cartes postales, les lynchages remplissent aussi les pages de certains journaux, accompagnés d’articles descriptifs.
Ainsi, en 1921, à l’extrême fin de la période qui nous intéresse ici, Le Courrier de Memphis, annonce-t‑il à ses lecteurs un « lynchage possible de trois à six Nègres en soirée ». Véritable appel au « crime-spectacle », les lynchages deviennent viraux : on en dénombrera plus de trois mille dans le Sud des États-Unis, entre 1877 et 1920. Souvent perpétré en raison d’accusations d’agression sexuelle et/ou de viol contre des femmes blanches – comme ce fut le cas pour Jesse Washington, suspecté d’avoir violé et tué la femme de son employeur et dont le corps fut, devant dix-mille personnes dont de nombreux enfants, émasculé, mutilé, brûlé et finalement pendu –, le lynchage devient la punition sexualisée du crime sexuel sous couvert de « justice populaire ».
Dans le Raj Britannique, c’est la grande révolte des Cipayes, en 1857, qui marque la fin de la « tolérance sexuelle » et de la mise en place d’une color line tout aussi puissante. « L’Indien » – à l’image de « l’Arabe » dans l’Algérie française ou du « Noir » dans le Transvaal ou dans l’État libre d’Orange[27] – est alors présenté comme un « prédateur sexuel », extrêmement dangereux pour les « Anglaises ». « Bestial » et « lascif », ce dernier, comme le décrivent à l’envi les histoires de viols de femmes blanches supposément perpétrés pendant la révolte, est en effet assimilé à une « sauvagerie sexuelle » qui doit être très sévèrement réprimée[28]. En Nouvelle-Calédonie ou en Australie, le viol – ou la tentative de viol – d’une « Blanche » conduisait d’ailleurs « l’indigène » concerné à la peine capitale. Aux îles Salomon, ainsi que le souligne James Boutilier[29], tout manque de respect aux « femmes blanches » est puni du fouet. Enfin, en Algérie, « l’Arabe » est associé à la figure du violeur, imaginaire qui accompagne les premiers migrants arrivant en métropole en 1905‑1906 et le flux de combattants et de travailleurs pendant la Grande Guerre.
Le régime des peines appliqué aux corps serviles et/ou colonisés, à l’image du lynchage pour celui qui déroge à l’interdit de la « chair féminine blanche », est d’une violence inouïe, violence qui s’accroît tout au long du XIXe siècle. « Paroxystiquement banale », celle-ci nous conduit à interroger le lynchage sur un autre versant : celui du sadisme sexuel, incontestablement à l’œuvre dans les imaginaires comme dans les pratiques des sociétés esclavagistes et coloniales du XIXe siècle et du début du XXe siècle.
Il y a en effet, dans certains motifs sadiques – le fouet, les chaînes, les attaches, les carcans, les pendaisons –, associés à des supplices pour lesquels on utilise des technologies particulières – machines à broyer les cannes, fours, chaudières – vouées à martyriser des parties spécifiques des corps serviles et/ou colonisés – et notamment les orifices : bouche, vagin, rectum –, une répétition trop évidente et systématique pour ne pas être questionnée. De même, la fixation obsessionnelle et pathologique sur la castration physique – comme figurée sur le dessin sans titre réalisé au fusain, en 1935, par le peintre africain-américain Charles H. Alston – ne procède pas seulement de la volonté des hommes blancs de s’auto-reviliriser face aux « profanations » que le sexe de leurs femmes avaient ou auraient pu subir, ni même de pallier la supposée supériorité sexuelle de ces hommes « Autres » du fait, par exemple, de l’« hypertrophie de leurs organes génitaux » (question couramment discutée à l’époque dans les milieux élitaires et populaires), mais bien de leur ôter/dénier ce qui fonde, par « essence », le statut, la position et le rôle de l’Homme dans l’ordre sexuel et racial du XIXe siècle : son pénis.
La sexualité comme domination
Émasculés physiquement, les corps serviles et/ou colonisés le sont enfin aussi symboliquement au travers de l’usage sexuel que maîtres et colonisateurs font de leurs femmes[30]. Dépossédés aussi en ce domaine, aussi bien réellement – par l’accaparement des femmes, dans le cadre du concubinage et de la prostitution[31], et des enfants, du fait de la prolifération des métis[32] – que métaphoriquement, par la construction d’imaginaires racistes et sexistes, les hommes de ces communautés se voient durablement dévirilisés du fait de leur incapacité à protéger ce qui, droit du genre oblige, leur appartenait « normalement » : les femmes et les enfants.
Comme le suggère Ann Laura Stoler, dans ces nouveaux Empires où l’intime est puissamment racialisé, « qui couchait ou se mariait avec qui n’a jamais été laissé au hasard »[33]. Ainsi la « matrice de la race[34] » se double-t‑elle ici d’une « maîtrise des sexes » qui repose bien sur la prise de possession, généralisée et banalisée, de corps féminins altérisés et objectivés, exotisés et érotisés. Car les femmes, (ex)-esclaves ou colonisées sont aussi présentées comme d’autant plus « offertes » aux désirs des maîtres et des colonisateurs que leur tempérament (associé à la « chaleur »), leur nature « lubrique » et « lascive » et leur appétit sexuel « insatiable » les y poussent inexorablement.
Cet appétit sexuel supposé les « virilise » et les constitue en « corps-machines », réservés non au plaisir « noble » de l’amour mais aux vils désirs du ventre. Au demeurant, entre « droit de cuissage » et « droit au coït »[35], éléments essentiels – au sein d’un « harem colonial »[36] perçu et pensé comme hypertrophié – d’une colonial way of life qui est, à la fois, affaire de prestige racial et de virilité blanche[37], le pouvoir du maître est sans limites. En contrepoint, il y a « l’honneur du Blanc » qui est en jeu, un thème autour duquel les savants[38] et les médecins[39] n’auront de cesse de disserter dans leurs études. Une virilité blanche qui, malgré les interdits raciaux (et l’encadrement de toute sexualité, dont la prostitution[40]), fait partie de la mythologie de la domination, aux côtés de la peur du métissage trop visible[41]. Dans le journal de la Côte-de-l’Or, Gold Coast Leader[42], hebdomadaire publié à partir de 1902 et instrument de la résistance togolaise aux colonisateurs allemands, la perspective est nette : des Togolais anonymes critiquent les brutalités commises, notamment sexuelles.
Comme l’écrit, sans aucune retenue, Louis Malleret, un spécialiste de la littérature coloniale : « Le sentiment du prestige de la race blanche fait que l’Européen n’envisage l’amour que comme une des formes de la domination. La possession fait partie de l’exercice de l’autorité[43]. » Ainsi, la conquête – qui fut une affaire d’hommes, où « l’Orient [et avec lui tous les espaces assujettis] fut pénétré, réduit au silence, et possédé » comme le rappelle Edward Said – s’accomplit par l’accaparement sexuel des femmes. Aussi émerge l’idée que le corps des femmes – qui, comme le souligne Anaïs Frantz, « est confronté à un double mépris : en tant que corps esclave ou colonisé et en tant que corps de femme[44] » – est devenu, pour les suprématistes blancs comme pour les « colonisateurs », un véritable champ de bataille… À tous les niveaux, les rapports coloniaux se lisent au filtre du genre. Martine Spensky conclut : « Les “rapports de race” sont au cœur des inquiétudes coloniales. Le contrôle de l’accès au corps des femmes, des “leurs” comme de celles des “autres”, est donc essentiel[45]. »
À l’issue de ce xixe siècle (1830‑1920), la virilisation des femmes « indigènes » et la prise de contrôle de leur corps se sont accompagnées d’une féminisation des hommes qui surligne leur incapacité à satisfaire sexuellement les femmes colonisées ou à les protéger de leurs agresseurs. Ainsi s’écrit une gestion des corps qui fait de la sexualité une des armes de la domination coloniale au xixe siècle, tout en structurant les relations interraciales du siècle suivant.
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Pour citer cet article : Pascal Blanchard & Christine de Gemeaux « Disposer des corps : contrôler, surveiller et punir », in Gilles Boëtsch, Nicolas Bancel, Pascal Blanchard, Sylvie Chalaye, Fanny Robles, T. Denean Sharpley-Whiting, Jean-François Staszak, Christelle Taraud, Dominic Thomas et Naïma Yahi, Sexualités, identités & corps colonisés, Paris, CNRS Éditions, 2019 : pp.267-279.
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