Parler « d’héritage olympique » est devenu incontournable depuis Paris 2024. Mais que recouvre réellement cette notion ? Est-ce une ambition politique, un récit collectif, un ensemble de transformations concrètes ? Ou, au contraire, un mot-valise qui masque la diversité — parfois la fragilité — de ce que les Jeux laissent derrière eux ?

C’est précisément autour de cette question centrale que se tient, les 9 et 10 décembre 2025 à l’Université de Toulouse, le colloque « Héritages olympiques : des Jeux 2024 aux défis des Alpes françaises 2030 », porté par le Groupe de recherche Achac, en partenariat avec les organisateurs des Enjeux des Jeux, et le soutien de l’ANCT, de la Dgesco et de la DILCRAH. Réunissant historiens, athlètes, journalistes, chercheurs en sciences sociales, responsables du mouvement sportif et institutions engagées, ce rendez-vous scientifique entend examiner ce que les Jeux produisent réellement : des traces, des mémoires, des récits, des politiques publiques, des ambitions urbaines — mais aussi des tensions, des débats et des engagements.

Ouvrir le débat : l’exposition comme point de départ. Le colloque s’ouvrira le 9 décembre par une visite commentée de l’exposition « Olympisme, une histoire du monde… en héritage », présentée sur le campus et portée par ses cinq commissaires : Nicolas Bancel, Pascal Blanchard, Yvan Gastaut, Sandrine Lemaire et Stéphane Mourlane. Ce temps inaugural donne le ton : replacer d’emblée l’Olympisme dans une trajectoire de 130 ans, où s’entremêlent bouleversements géopolitiques, évolutions du CIO, circulations d’athlètes et luttes des minorités. L’héritage olympique n’y apparaît jamais comme un simple effet, mais comme une construction historique, politique et sociale.

Table ronde 1 — Quel héritage des JOP 2024 aujourd’hui ? La première table ronde, « Quel héritage des JOP 2024 aujourd’hui ? », sera ouverte par Patrick Umhauer, chargé de mission auprès du président de la CASDEN Banque Populaire, qui reviendra sur le programme « Histoire, Sport et Citoyenneté » (2020-2024), matrice d’une réflexion nationale sur les liens entre sport, mémoires et citoyenneté. Animée par Pascal Blanchard, historien (UNIL/CRHIM) et codirecteur du Groupe de recherche Achac, et Sandrine Lemaire, agrégée et docteure en histoire, codirectrice du Groupe de recherche Achac, elle réunira les historiens Michaël Attali (Université Rennes 2 / VIPS2), Nicolas Bancel (UNIL/CRHIM, codirecteur du Groupe de recherche Achac), Yvan Gastaut (Université Côte d’Azur / URMIS) et Philippe Tétart (Université du Mans / TEMOS) mais aussi Vincent Duluc, journaliste à L’Équipe et président du conseil d’administration du Musée national du Sport et enfin Apolline Vedrenne, référente paralympique territoriale Occitanie (CPSF).

En croisant leurs approches — historique, médiatique, paralympique, institutionnelle — cette session interrogera la réalité de l’héritage des Jeux de Paris : ce qui s’est consolidé (pratiques sportives, initiatives éducatives, dynamiques territoriales) ; ce qui se discute encore (durabilité, inclusion, accessibilité, politique publique du sport) ; et ce qui reste à construire (mémoire partagée, représentations, transmission vers les jeunes générations). 

Ce moment permettra d’examiner les Jeux non pas comme un bloc homogène, mais comme une mosaïque d’effets différenciés, parfois durables, parfois éphémères.

Table ronde 2 — Des Jeux de 2024 aux Jeux de 2030 : héritages, perspectives, dynamique… Le 10 décembre, un second temps de réflexion s’ouvrira avec Stéphane Mourlane, historien (Aix-Marseille Université / TELEMMe), autour des perspectives 2030 : comment penser la prochaine édition, ses enjeux, ses risques, ses promesses ? Cette table ronde, animée par Nicolas Bancel et Yvan Gastaut réunira les historiens Pascal Blanchard, Sandrine Lemaire, Pascal Charitas (Université Paris Nanterre / ISP), Stéphane Kronenberger (Aix-Marseille Université / TELEMMe), Karen Bretin (Université Bourgogne / LIR3S) mais aussi Amélie Oudéa-Castéra, présidente du Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) et ancienne ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, et d’Emmeline Ndongue, ancienne internationale de basketball, Manager Éducation Paris 2024.

Cette session posera une autre question fondamentale : comment fabrique-t-on l’héritage d’un événement avant même qu’il n’ait eu lieu ? C’est là que se jouent les enjeux environnementaux, l’avenir des territoires alpins pour 2030, les modèles économiques et symboliques des Jeux, mais aussi l’articulation entre héritage matériel (infrastructures, aménagements) et héritage immatériel (valeurs, pratiques, mémoires, récits). 

Les interventions viendront éclairer les défis spécifiques des Jeux d’hiver dans un contexte climatique inédit ; la place du mouvement sportif et de ses institutions dans la construction de l’héritage ; la manière dont les représentations et la mémoire de 2024 influenceront la préparation de 2030 ; le rôle essentiel des sciences sociales dans l’évaluation et l’anticipation des impacts.

Une question : qu’est-ce que nous voulons transmettre ? Ce colloque réaffirme une conviction forte : l’héritage n’est jamais un acquis. Il se discute, s’organise, se construit. Il engage des acteurs multiples : institutions, chercheurs, enseignants, athlètes, citoyens, territoires. Il repose sur des analyses, des choix, des arbitrages, des récits. Il exige d’assumer les réussites, d’identifier les impensés et de questionner les zones de tension. L’héritage olympique, c’est tout cela à la fois : une mémoire à partager, des valeurs à interroger, des pratiques à transmettre, et une responsabilité collective à assumer.

En réunissant pendant deux jours celles et ceux qui pensent, vivent, analysent et organisent les Jeux, le colloque de Toulouse ouvre un espace rare : un lieu où l’Olympisme n’est pas seulement célébré, mais compris — dans sa complexité, ses contradictions et ses promesses.