Le génocide des Amériques
Par Jacques B. Gélinas
Installés au Brésil, les universitaires Marcel Grondin et Moema Viezzer ont publié en octobre 2022 Le Génocide des Amériques : Résistance et survivance des peuples autochtones chez l’éditeur Écosociété. Dans cet ouvrage, les auteurs avancent l’hypothèse que le génocide des peuples autochtones des Amériques serait le plus grand génocide qu’ait connu l’histoire de l’humanité. Ils estiment que 90 à 95% des populations originaires des Amériques auraient été éliminées. Ce livre couvre cinq grands espaces – Caraïbes, Mexique, Andes, Brésil et Etats-Unis – auxquels s’ajoute un chapitre inédit sur le Canada signé par Pierrot Ross-Tremblay et Nawel Hamidi. Bien que ce livre retrace le génocide des peuples premiers des Amériques, l’ouvrage rend compte aussi de leur résistance et de leur lutte pour survivre jusqu’à aujourd’hui. En effet, nombreux sont les peuples indigènes qui se battent encore pour faire respecter et avoir accès aux droits humains.
L’ouvrage magistral de Marcel Grondin et Moema Viezzer, publié au Brésil en portugais-brésilien en 2018, est venu combler une grave lacune en dressant un inventaire de la tragédie qui a entaché le drame que fut la colonisation des Amériques par les puissances européennes. Le génocide des Amériques est le nom de cette tragédie. Il existait des études éparses sur les multiples génocides qui ont ensanglanté ce continent depuis sa « découverte » par les Européens. Cependant, il ne se trouvait point d’ouvrage rassemblant dans un même récit les génocides commis sur cet immense territoire par les empires coloniaux. Considérant l’ampleur géographique de la tragédie, les auteurs se sont concentrés sur cinq régions : les Caraïbes, le Mexique, les Andes centrales, le Brésil et les États-Unis.
Les Éditions Écosociété, qui publient cette version française du livre, ont voulu compléter l’inventaire en y ajoutant un chapitre sur le génocide des Peuples Premiers au Canada. L’éditeur en a confié la rédaction à un historien innu, Pierrot Ross-Tremblay, originaire d’Essipit, sur la Côte-Nord du fleuve Saint-Laurent, en collaboration avec l’avocate Nawel Hamidi.
Il est impossible aujourd’hui de comprendre le sous-développement ou mal-développement socioéconomique des pays latino-américains et caribéens sans prendre la mesure de l’héritage que leur ont laissé l’esclavagisme et le colonialisme. Ces deux facettes d’une prédation génocidaire ont joué un rôle crucial dans l’enrichissement des contrées – l’Europe, les États-Unis, le Canada – qui ont perpétré cet abominable forfait. Par ailleurs, la répartition inégale des richesses à l’intérieur des pays colonisés de l’Amérique latine et des Caraïbes porte aujourd’hui encore la trace de cet héritage funeste.
Le livre est aussi un hommage à ces peuples audacieux et créatifs qui habitaient Abya Yala avant que les Européens y mettent le pied pour en piller les ressources et exploiter les habitants. Abya Yala est le nom originel que donnèrent au continent américain les membres de la nation Kuna, du Panama et du nord de la Colombie et qui fut adopté par une grande partie des Peuples Premiers des Amériques pour nommer le territoire qui est le leur. Ce sont eux, les Peuples Premiers, les véritables découvreurs de la plus grande des îles qu’ils ont parcourue et explorée du Cercle polaire à la Terre de Feu – sans oublier les petites îles antillaises – en y créant des civilisations et des modes de gouvernement exemplaires.
Comme le souligne le sous-titre de l’ouvrage, ils ont résisté et survécu, mais n’ont-ils par raison de réclamer aujourd’hui non seulement des excuses, mais aussi des réparations à la hauteur des vexations subies ? Voilà la portée de ce livre qui est immense.
TABLE DES MATIÈRES
Présentation de l’édition française
Préface de l’édition originale
Introduction
- Pour commencer : qu’est-ce qu’un génocide ?
- Portée de cette publication
Antécédents
- L’Europe amorce ses conquêtes d’outre-mer
- À l’époque médiévale
- Le grand tournant
- Le Portugal et l’Espagne sur les rives de l’Atlantique
- Un nouvel acteur entre en scène
Partie 1
Dans les îles de la mer des caraïbes. Le début du génocide des peuples autochtones
- 1. À la rencontre du paradis
- 2. Second voyage de Colomb au Nouveau Monde
- 3. Le génocide commence : le paradis devient un enfer
- 4. L’Exploitation des autres îles des Caraïbes
- 5. La résistance des Taïnos
- 6. Survivance : zéro
Partie 2
Mexique. Le génocide atteint le continent
- 1. Civilisations précolombiennes
- 2. Le génocide au Mexique
- 3. La résistance indigène
- 4. Survivance
- 5. Organisation
Partie 3
Les Andes centrales. De l’Empire du Soleil à « une nouvelle place au soleil »
- 1. Civilisations préincas
- 2. L’empire des Incas : apogée et décadence
- 3. Les Andes : nouvelle cible de la conquête espagnole
- 4. L’effondrement démographique et ses causes
- 5. Survivance
- 6. Un exemple incomparable de survivance dans les Andes : l’État plurinational de Bolivie
Partie 4
Brésil. Le génocide qui n’est pas encore terminé
Introduction
- 1. Le Brésil apparaît sur la carte du « Nouveau Monde »
- 2. Le début du génocide
- 3. Le déclin de la population indigène
- 4. Résistance des Premières Nations
- 5. Survivance
Partie 5
Les États-Unis d’Amérique. Le « nettoyage ethnique » comme politique
- 1. Que s’est-il produit ?
- 2. L’expansion blanche et le déclin des Premières Nations
- 3. Résistances des peuples originaires
- 4. Survivance
Un nouveau départ
Abya Yala ! Une organisation continentale des peuples originaires des Amériques
- Résister et survivre, c’est réinventer
- La prophétie de l’aigle et du condor
- Les sommets continentaux d’Abya Yala
- Marathons continentaux : les journées de la paix et de la dignité
- Participation d’Abya Yala à des initiatives mondiales
- Pour finir et… recommencer
Annexes
- La carte n’est pas le territoire
- Le génocide colonial des Premiers Peuple au Canada (par Pierrot Ross-Tremblau et Nawal Hamidi)